Le 1er
juillet, ces
citoyens bagdadi , une ménagère et un jeune
homme, encore peu acclimatés à la démocracie, s'affolent
bêtement au milieu des encombrements de
Bagdad.
Ignoreraient-ils que la
démocratie est la souveraineté
enfin
donnée aux citoyens? C'est pourquoi chaque quartier de
Bagdad est
maintenant abandonné à un citoyen qui
librement le contrôle, aidé par
une troupe (un "gang" disent les mauvais esprits, pfft!) de
volontaires. Cet "Émir" "rend la justice" et
"préside la
prière" dans son quartier, décide "dans
l'intérêt de tous" quelles
marchandises entreront dans la quartier ou y transiteront et quels
"droits" on lui paiera pour elles, quelles personnes pourront traverser
le quartier, qui vivra là ou cessera d'y vivre, etc.
Dans
la capitale,
tous quartiers confondus, on compte à peu près
1.000 "sentences
rendues" par mois (les mauvais esprits disent "crimes", bah!) sans
compter les "mises à l'abri" (les mauvais esprit disent
"rapts" ou
"enlèvements", pfft!). Personne ne sait ce qui se passe
ailleurs dans
le pays, car on a aboli la circulation des informations pour être bien
sûr que l'abolition de la censure de Saddam Hussein est
intégrale. Le
gouvernement installé par les Américains ne
sert à rien, puisque les
peuples heureux n'ont pas besoin de gouvernement. Ce gouvernement a
lancé une offre d'amnistie à tout citoyen
qui, en se sentant trop libre
de montrer son opinion, a "tué moins de 2.500 personnes"
(en lisant ce
chiffre je suis pris d'un rire nerveux). Donc, le crime commence
à 2501
cadavres. Quel peuple jusqu'à ce jour de l'Histoire a pu
se targuer de
plus de liberté et largesse d'esprit?
Le potentat Saddam Hussein,
qui faisait régner une "paix, mais tyrannique," dans le
pays jusqu'à ce
que Zorro survienne et désenchaîne les énergies brimées, va être
condamné et exécuté. Sa
modération plus que suspecte — pas plus de
quelques centaines d'arrestations et (en moyenne) quelques dizaines
d'exécutions par an — apporte la preuve qu'un
dangereux liberticide
opprimait l'Irak, où l'on peut enfin tuer librement tous ceux qu'on
veut.
Trêve de plaisanterie. "Al-Bayyan Al-Jadidah", quotidien de Bagdad,
"défaitiste
et
anti-démocratique" (selon un bulletin de l'US-Army), dit
que "Le pays
est au bord de l'abîme. La violence et le meutre se
répandent [...]
L'Irak est une jungle où les faibles sont les proies des
forts, où la
fraternité se dissout dans des combats sectaires [...]
Voilà le
résultat de l'intenvention militaire des
Américains et des Britanniques
[...]"
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